Alors que la volatilité revient en force sur les marchés financiers, nous examinons les facteurs macroéconomiques favorables et défavorables susceptibles d’avoir des répercussions pour les investisseurs.
8 septembre 2022
Par Joseph Wu, CFA
L’inflation demeure sans doute le facteur le plus important du contexte macroéconomique, puisque son évolution influe directement sur le rythme du resserrement de la politique monétaire et, par conséquent, sur l’économie et les marchés. Elle restera probablement problématique en Europe, en raison de la crise de l’énergie qui ne semble pas près d’être résolue. En revanche, aux États‑Unis et dans d’autres grandes économies, les dernières données laissent entrevoir un possible plafonnement des pressions, ce qui est de bon augure. Fait encourageant, la baisse des prix des marchandises, la décongestion des chaînes logistiques et le ralentissement de la croissance devraient contribuer à modérer l’inflation au cours des prochains trimestres.
À notre avis, les pressions exercées sur les prix devraient commencer à se relâcher. Par contre, la rapidité à laquelle l’inflation retombera est impossible à déterminer. Selon certains éléments, il faudra beaucoup de temps avant qu’elle revienne à des niveaux acceptables pour les banques centrales. Aux États‑Unis, l’inflation élevée des prix des produits et services qui, normalement, ne varient guère, combinée à la forte croissance des salaires, indique que les pressions sous‑jacentes exercées sur les prix de base demeurent excessivement fortes, comme le montre le graphique de droite. Les responsables de la Réserve fédérale américaine (Fed) ont donc récemment réaffirmé qu’ils étaient fermement résolus à faire reculer l’inflation à sa cible de 2 %. Pour y parvenir, ils comptent sur de nouvelles hausses de taux ainsi que sur une réduction de la liquidité en procédant au resserrement quantitatif à un rythme assez soutenu pour l’avenir prévisible.
Le graphique linéaire montre l’évolution d’une année sur l’autre depuis 1988 de l’indice d’inflation des DPC de base aux États-Unis et de l’indice des prix rigides à la consommation de base de la Fed d’Atlanta. Au dernier relevé mensuel, les deux indices s’établissaient respectivement à 4,6 % et à 5,6 %, ce qui est nettement supérieur à la cible d’inflation à long terme de la Fed, fixée à 2 %.
Sources : RBC Gestion de patrimoine, Bloomberg ; données mensuelles prises en compte jusqu’au 31 juillet 2022.
L’économie mondiale a perdu une bonne partie de son dynamisme cette année, sous l’effet du resserrement des conditions financières, l’envolée des coûts d’emprunt et l’inflation obstinément élevée ayant miné la demande des consommateurs et l’activité des entreprises. Bien que les prévisions visant le PIB aient été revues à la baisse depuis le début de l’année, la Fed a décrété plusieurs hausses de taux. D’après nous, cela prouve sa détermination à poursuivre le resserrement malgré les obstacles qui freinent la croissance. Les marchés des contrats à terme s’attendent d’ailleurs à d’autres relèvements des taux au cours des prochains trimestres. Nous croyons donc que les risques pour les perspectives économiques demeurent orientés à la baisse (voir le graphique du haut à droite).
Le graphique linéaire montre l’indice des directeurs d’achats (PMI) du secteur manufacturier mondial auquel se superpose l’indice Goldman Sachs des conditions financières aux États-Unis, et ce, depuis 2007. L’indice des conditions financières est inversé afin de mettre en évidence le fait qu’il évolue de concert avec l’indice PMI. Depuis le milieu de 2021, l’indice PMI mondial a baissé, tandis que l’indice des conditions financières a signalé un resserrement.
Nota : Le seuil de 50 de l’indice des directeurs d’achats (PMI) sépare l’expansion de la contraction En ce qui a trait à l’indice des conditions financières, une ligne descendante (valeurs plus élevées) dénote un resserrement des conditions.
Sources : RBC Gestion de patrimoine, Bloomberg ; données mensuelles prises en compte jusqu’au 31 août 2022.
Le nombre de révisions à la baisse des prévisions visant les bénéfices a augmenté au cours des derniers mois. Le déclin des prévisions générales du bénéfice par action (BPA) est toutefois beaucoup moins marqué (voir le graphique du bas à droite) que le ralentissement signalé par le recul de la confiance des entreprises manufacturières à l’échelle mondiale et les diminutions importantes de la croissance du PIB des grandes économies prévue pour 2022. Néanmoins, compte tenu de la décélération de la croissance mondiale, il faut s’attendre à ce que les bénéfices prévus soient abaissés à court terme.
Le graphique linéaire illustre l’évolution depuis le début de l’année du bénéfice par action (BPA) prévisionnel sur 12 mois pour l’indice S&P 500 et l’indice MSCI Monde tous les pays. Les prévisions des bénéfices ont raisonnablement bien tenu et sont actuellement un peu plus élevées qu’au début de l’année.
Sources : RBC Gestion de patrimoine, Bloomberg ; données hebdomadaires prises en compte jusqu’au 6 septembre 2022.
L’économie américaine, qui donne le ton au reste du monde, s’est fortement essoufflée cette année, faisant craindre une récession imminente. Cependant, les ménages disposent encore d’une épargne considérable et le marché du travail va bon train, comme le montrent les nombreux postes vacants. La plupart des risques immédiats semblent donc limités et le scénario d’un « atterrissage en douceur » nous paraît encore possible.
Toutefois, la probabilité d’une récession aux États‑Unis augmentera vraisemblablement, selon nous, notamment parce que la Fed a l’intention de porter les taux d’intérêt à un niveau restrictif ; cela resserrera davantage les conditions financières, tout en freinant l’activité économique. RBC Gestion mondiale d’actifs a mis à jour sa feuille de pointage du cycle de l’économie américaine : celle‑ci montre que l’économie américaine est rapidement arrivée à maturité, puisque la majorité des indicateurs sont passés dernièrement au « stade avancé » ou à la « fin de cycle ». Notre feuille de pointage sur la récession aux États‑Unis s’est détériorée depuis juin, trois des sept indicateurs annonçant maintenant une récession, ce qui corrobore l’opinion selon laquelle la probabilité d’un repli de l’économie américaine au cours des 12 prochains mois augmente.
L’incertitude entourant l’économie mondiale est anormalement élevée, et de nombreux indicateurs avancés présentent encore une tendance défavorable ; en Chine, les confinements liés à la pandémie et les difficultés du marché immobilier plombent l’économie, tandis qu’aux États‑Unis, le risque politique devrait s’accentuer à l’approche les élections de mi‑mandat. Par conséquent, nous recommandons aux investisseurs de conserver une structure légèrement défensive et souple dans leurs portefeuilles et de surveiller les occasions de valeur relative.
En ce qui concerne les marchés boursiers, la production des bénéfices nous paraît essentielle. Dans un contexte de croissance économique lente mais positive, nous pensons que les bénéfices pourraient se maintenir au cours des 12 prochains mois et offrir un soutien fondamental aux prix des actions. Si la récession se matérialise, par contre, il faudra s’attendre à ce qu’ils diminuent fortement. Comme nous l’avons expliqué dans les Perspectives mondiales du mois d’août, durant les onze récessions survenues aux États‑Unis depuis les années 1950, les bénéfices des sociétés de l’indice S&P 500 ont chuté de 23,6 % en moyenne.
Par ailleurs, la gamme d’occasions offertes sur les marchés de titres à revenu fixe s’est nettement améliorée, d’après nous : les rendements attendus semblent de plus en plus raisonnables grâce au bond des taux obligataires et à une légère augmentation de la prime de risque de crédit par rapport à l’année dernière. De plus, sur le plan des rendements en revenus, l’avantage des actions sur les obligations de société a sensiblement diminué au cours de l’année écoulée, comme le montre le graphique de droite. Enfin, comme les rendements en revenu sont aujourd’hui beaucoup plus élevés, ils procureront une meilleure protection contre les futures hausses de taux, tout en renforçant la capacité de diversification des obligations relativement aux actions.
Le graphique à barres montre l’évolution sur un an et la moyenne depuis 2002 du ratio bénéfice prévisionnel/cours de l’indice MSCI Monde tous les pays et de l’indice S&P 500, ainsi que le pire rendement de l’indice des titres de sociétés américaines Bloomberg et de l’indice des titres de sociétés américaines à rendement élevé Bloomberg. Sur le plan des rendements en revenus, l’avantage des actions sur les obligations de société a sensiblement diminué au cours de l’année écoulée.
Nota : Le ratio bénéfice‑cours est l’inverse du ratio cours/bénéfice prévisionnel. CI = catégorie investissement ; RE = rendement élevé. Le rendement en revenu des obligations renvoie au pire rendement de l’indice des titres de sociétés américaines Bloomberg (obligations de catégorie investissement) et de l’indice des titres à rendement élevé de sociétés américaines Bloomberg (obligations à rendement élevé).
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