Remontées, récessions et réalisme

Analyse
Perspectives

Le redressement de l’indice S&P 500, ces neuf derniers mois, n’est pas le début d’un nouveau marché haussier, selon nous, mais plutôt la dernière étape de la reprise actuelle.

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27 juin 2023

Jim Allworth
Stratégiste, Portefeuilles
RBC Dominion valeurs mobilières

  • La reprise des marchés depuis les creux de septembre a été suffisamment marquée pour convaincre de nombreux sceptiques. Il n’est pas impossible que les indices nord‑américains fassent comme d’autres grands marchés et atteignent de nouveaux sommets cet été.
  • La crainte de rater une occasion a fait remonter les indices nord‑américains, remontée qui pourrait se poursuivre encore quelques mois. Toutefois, les valorisations attrayantes de septembre dernier sont en train de faire place à des ratios cours/bénéfices plus élevés qui, à notre avis, auront besoin de la coopération de l’économie pour être justifiés.
  • Les indicateurs avancés fiables d’une récession aux États‑Unis continuent d’empirer, ce qui nous laisse croire que le plus récent bond des cours boursiers sera suivi d’une période plus difficile pour les investisseurs.

Il y a un an, lors de la publication de nos Perspectives de milieu d’année 2022, le portrait des marchés boursiers était essentiellement à l’opposé de celui d’aujourd’hui :

  • Au début de 2022, les banques centrales (dont la Fed) étaient prêtes à tolérer une certaine hausse de l’inflation, mais elles ont changé d’avis, car les prix ont augmenté beaucoup plus rapidement que les responsables des politiques ne l’avaient prévu au commencement de l’année. Le milieu de l’année a marqué les premières étapes de ce qui deviendrait la série de hausses de taux les plus fortes de l’histoire. La Fed allait relever les taux de 75 points de base quatre fois de suite – du jamais vu –, puis elle allait pratiquer quatre hausses supplémentaires, plus petites, totalisant 125 points de base de plus.
  • À la même période l’an dernier, les ratios cours/bénéfice (C/B) du marché boursier avaient déjà été poussés vers le bas à cause de la montée en flèche des taux obligataires attribuable au resserrement de la Fed. L’indice S&P 500 était en baisse de 27 % par rapport à son sommet de janvier 2022, tandis que le NASDAQ avait perdu 38 % par rapport à son niveau le plus élevé, atteint en novembre 2021. Les deux indices avaient souffert grandement de la forte baisse des ratios C/B des titres de croissance de sociétés à mégacapitalisation qui étaient auparavant en plein essor. Les six plus importantes d’entre elles représentaient plus de 25 % de la valeur du S&P 500 au point culminant du marché, au début de janvier 2022.

Début de la remontée

La plupart des indices boursiers mondiaux ont continué à perdre du terrain jusqu’en septembre dernier, avant de rebondir pour suivre une nouvelle trajectoire ascendante. Cette remontée s’est poursuivie jusqu’à aujourd’hui. De septembre à mai, ce mouvement était considéré par la plupart comme une reprise non durable au sein d’un marché baissier. Toutefois, l’indice S&P 500 a nettement dépassé sa fourchette de négociation au cours des six derniers mois, ce qui a ravivé l’optimisme des investisseurs. Les indicateurs de la confiance des marchés ont fortement progressé, car la prudence a fait place à la crainte de rater une occasion.

Pour notre part, nous pensons que la reprise des marchés boursiers pourrait continuer. Les indices FTSE All‑Share du Royaume‑Uni, EURO STOXX 50 et TOPIX du Japon ont tous été propulsés à de nouveaux sommets du présent cycle. Avant la fin de la reprise, nous prévoyons que l’indice S&P 500 et l’indice composé S&P/TSX du Canada y parviendront aussi.

Nouveau marché haussier ou dernier souffle

Nous n’avons pas vraiment l’impression d’assister au début d’un nouveau marché haussier. Nous croyons plutôt que nous nous retrouvons dans la dernière étape de la reprise actuelle. Quoi qu’il en soit, le marché est sans contredit dans une situation différente de celle qu’il a connue lors des creux de septembre. À ce moment‑là, la plupart des indices étaient en chute libre depuis neuf mois, voire plus longtemps dans certains cas. Le ratio C/B de l’indice S&P 500, évalué selon nous de façon nettement exagérée à 23,1 fois au point culminant du marché au début de janvier 2022, avait été ramené à un niveau beaucoup plus acceptable et légèrement sous‑évalué de 15,9 fois en septembre. Cette baisse de l’indice et des valorisations s’est produite même si les bénéfices rapportés étaient en hausse, le bénéfice par action sur 12 mois étant passé de 208 $ à 219 $. Parallèlement, au cours de la même période, la confiance des investisseurs s’est écroulée au rythme du marché, passant d’un optimisme intenable lors du sommet de janvier à un pessimisme tout aussi intenable au moment du creux de septembre.

Depuis, des bouleversements sont survenus un peu partout. Le marché boursier américain s’est redressé pendant neuf mois au lieu de fléchir, et le S&P 500 se rapproche de nouveaux sommets historiques. Les ratios C/B ont de nouveau franchi la très haute barre de 20 fois. De plus, comme nous l’avons mentionné ci‑dessus, les indicateurs de confiance se sont envolés pour se rapprocher des niveaux insoutenables (sans y être encore) observés pour la dernière fois au point culminant du marché atteint il y a un an et demi.

N’allez pas à contre‑courant de l’économie

Cette vigoureuse remontée des indices boursiers (principalement attribuable, une fois de plus, à une poignée d’actions de sociétés à mégacapitalisation du domaine de la technologie et de secteurs connexes, ainsi qu’à une vague d’intérêt de la part des investisseurs pour tout ce qui a trait de près ou de loin à l’intelligence artificielle) persuade certains observateurs du marché que l’économie américaine ne basculera pas dans une profonde récession. Toutefois, la plupart des indicateurs avancés fiables d’une récession (voir notre feuille de pointage sur la récession aux États‑Unis ) se dirigent inexorablement vers des résultats encore plus négatifs.

Comparaison de l’indice S&P 500 et de l’indice S&P 500 équipondéré

Indexés à la valeur de l’indice S&P 500 au 3 février 2023

Comparaison de l’indice S&P 500 et de l’indice S&P 500 équipondéré

Le graphique linéaire montre la valeur de l’indice S&P 500 et de l’indice S&P 500 équipondéré à la fin de chaque semaine, du 3 février au 23 juin 2023. Au 23 juin, le S&P 500 était en hausse de 7 %, tandis que l’indice équipondéré était en baisse de 4 %.

  • Indice S&P 500
  • Indice S&P 500 équipondéré

Sources : Standard & Poor’s, FactSet ; données hebdomadaires prises en compte jusqu’au 2023‑06‑23.

Bien entendu, même les indicateurs avancés d’une récession aux États‑Unis qui ont donné des résultats justes régulièrement dans les 70 dernières années pourraient avoir tort cette fois‑ci. Il se peut que les bénéfices et le PIB sortent de leur marasme, à compter de maintenant. Si les prévisions générales de bénéfices actuelles sont justes (231 $ par action dans un an, et 246 $ par action pour l’ensemble de 2024), c’est peut‑être ce qui est en train d’arriver. La valeur actuelle de l’indice serait donc de presque 19 fois les bénéfices pour l’année à venir, ce qui n’est pas donné, mais peut‑être pas trop risqué non plus, à notre avis.

Toutefois, notre feuille de pointage de la récession nous indique que les hypothèses économiques sous‑jacentes nécessaires pour que ces gains se matérialisent sont de moins en moins probables chaque semaine. Nous prévoyons qu’une récession s’amorcera aux États‑Unis cette année, que les bénéfices réels seront inférieurs aux estimations générales actuelles et que les cours boursiers seront mis à mal pendant une période éprouvante au cours de laquelle l’optimisme irrationnel des investisseurs finira par céder la place à un pessimisme irrationnel.

Seules les actions de sociétés solides doivent être prises en considération

Nous continuons de recommander une pondération neutre des actions pour un portefeuille équilibré mondial, car nous croyons que leur progression devrait se poursuivre au cours des mois d’été. Toutefois, nous pensons de plus en plus que les investisseurs doivent limiter leurs choix d’actions aux sociétés dans lesquelles ils seraient heureux de détenir une participation en période de récession. Pour nous, ces sociétés sont des entreprises de grande qualité qui se caractérisent par des bilans solides, des dividendes durables et des modèles d’affaires n’étant pas particulièrement sensibles au cycle économique.


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