Cinq changements dans le monde de l’art qui contribue à créer un marché plus inclusif

Analyse
Perspectives

La réinvention numérique, les évolutions sociétales et une nouvelle génération de collectionneurs dotés de motivations nouvelles contribuent à accroître l’inclusivité dans le monde de l’art.

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Une décennie de réinvention numérique silencieuse associée à une nouvelle génération de collectionneurs et à une évolution des motivations d’achat des œuvres d’art ont permis de remodeler le marché de l’art. Le monde de l’art est devenu aujourd’hui plus numérique, plus inclusif et est ouvert à un plus grand nombre.

Selon Stefan Hancherow, conservateur d’art du commissariat d’exposition de RBC, cette évolution n’est pas surprenante, le monde de l’art est toujours en mouvement. « À certaines périodes de l’année ou au cours de certaines décennies, des idées arrivent au-devant de la scène, les choses vont et viennent. » Néanmoins, le monde de l’art a aujourd’hui radicalement changé, il est bien différent du monde que nous connaissions avant la pandémie.

Voici cinq tendances qui ont contribué à sa redéfinition.

1. Vers plus d’inclusivité

Selon Hancherow, un des changements décisifs dans le monde de l’art est la recherche d’une plus grande inclusivité au sein de ce marché, de la part de tous les acteurs. « Non seulement les artistes noirs, autochtones ou de couleur, les artistes femmes et LGBTQ+, mais aussi les marchands et les collectionneurs, de mon point de vue, sont engagés dans ce combat et appellent sans relâche à un changement profond. » Grâce aux musées et aux institutions qui s’efforcent de promouvoir des programmations en faveur de la diversité, ce changement reste porté et soutenu par un large écosystème. « Je vois ce mouvement s’étendre », a indiqué Hancherow.

Par exemple, la maison de vente aux enchères Christie’s a multiplié ses efforts pour accroître la diversité et la représentativité en 2021 en nommant davantage de femmes (y compris des personnes noires, autochtones ou de couleur) à des postes de direction et en établissant une parité hommes-femmes parmi les encanteurs.

Tricia Heuring, conservatrice et coordonnatrice de la collection d’œuvres d’art à Minneapolis pour RBC Gestion de patrimoine – États-Unis, a déclaré que le monde de l’art n’a jamais été aussi ouvert. « Le monde de l’art a toujours été un milieu très fermé », a indiqué Heuring. Toutefois, les évolutions sociétales observées sur ces dernières années ont contribué au changement. « En essayant de démonter des structures et des systèmes qui étaient vraiment oppressifs, de libérer le monde de l’art de ses contraintes dans un certain sens, ces évolutions ont conduit à l’apparition de nouveaux marchés, de nouvelles communautés et d’une nouvelle éthique d’engagement. »

2. Nouvelle génération, nouvelles motivations

En ligne avec une attention accrue portée à l’inclusivité, la nouvelle génération de collectionneurs introduit également de nouvelles motivations dans le monde de l’art. Selon les chiffres 2021 de Christie’s, un tiers des nouveaux acheteurs sont des millennaux. Le rapport Art et finance 2021 de Deloitte et ArtTactic a relevé que 86 % des jeunes collectionneurs (c.-à-d., les moins de 35 ans) considèrent l’art comme un investissement d’impact social, contre seulement 32 % chez les plus de 35 ans. L’impact social devient la principale motivation (avec la valeur émotionnelle) pour la nouvelle génération de collectionneurs.

« Savoir où vous placez votre argent et comment vous soutenez les artistes de votre communauté vous procure un réel sentiment de contrôle », a indiqué Heuring. Elle assimile cette idée à celle de soutenir les entreprises locales, un mouvement qui avait été vraiment pris de l’ampleur dans les débuts de la pandémie de COVID-19. « Je pense que l’idée a fait son chemin jusqu’à se muer en une motivation ou une permission de collectionner les œuvres d’art dans cette même optique. »

La nouvelle génération s’intéresse également davantage aux artistes noirs, autochtones ou de couleur. Un rapport de la plateforme de vente d’œuvres d’art en ligne Artsy, Art Collecting 2021, a souligné qu’environ un quart des collectionneurs déclarent qu’il est important pour eux d’acquérir des œuvres d’artistes issus des minorités, afin de contribuer à une plus grande diversité de représentation dans le domaine des arts.

3. La transformation numérique crée une dynamique

En plus de nouvelles motivations, la nouvelle génération révolutionne la manière de vendre les œuvres d’art. Selon le rapport de Deloitte et ArtTactic, les ventes aux enchères exclusivement en ligne de Sotheby’s, Christie’s et Phillips ont atteint 1,05 milliard de dollars américains en 2020, éclipsant les ventes de 168 millions de dollars américains en 2019. Le rapport 2021 d’Artsy a fait état d’une hausse de 30 % entre 2020 et 2021 du nombre de collectionneurs ayant acheté une œuvre d’art en ligne.

Les plateformes en ligne comme Artland et Peggy rendent le marché de l’art plus transparent et davantage accessible.

Les médias sociaux servent également de moyen d’expression pour les artistes, bouleversant le modèle classique d’exposition en galerie d’art. « Il existe des artistes qui n’ont vraiment plus besoin d’être exposés en galerie, car ils ont 50 000 abonnés sur Instagram et communiquent directement avec leur propre auditoire, a ajouté Heuring. Ils partagent leur processus de création tout au long de l’année, puis proposent à la vente leurs œuvres achevées et leur propre auditoire les achètent directement auprès d’eux. »

4. L’engouement pour la chaîne de blocs propulse les jetons non fongibles au premier plan

Malgré l’engouement autour des jetons non fongibles, une forme d’actif numérique unique stocké dans la chaîne de blocs, Christie’s et Sotheby’s ont seulement vendu 240 millions de dollars américains à la fois de jetons non fongibles d’art et de collections numériques, un faible pourcentage de leurs ventes collectives globales.

Mais la technologie de la chaîne de blocs offre l’avantage de la traçabilité. « Il existe des artistes très consciencieux qui utilisent le certificat numérique pour leurs œuvres d’art physique ou des projets complexes d’œuvre d’art numérique », explique Sara Johnson, vice-présidente, Planification de legs, Successions, œuvres d’art et actifs numériques, Services de planification, Clientèle fortunée – International chez RBC Gestion de patrimoine au Canada. » Du point de vue des collectionneurs, Johnson compare l’intérêt pour les investissements dans les jetons non fongibles au début de la ruée vers l’or. « Les plateformes de jetons non fongibles semblent sans cesse se renouveler, a-t-elle ajouté. Les risques demeurent élevés, en particulier concernant l’évaluation globale, les paiements en cryptomonnaies et l’avenir des redevances versées aux artistes fondées sur le code, a-t-elle dit. À mesure que le marché se développe, les risques sont mieux maîtrisés, mais la courbe d’apprentissage quotidienne est exponentielle et les épreuves rencontrées sont très enrichissantes. »

5. Vers une meilleure reconnaissance des artistes canadiens

Une autre tendance dominante est l’essor grandissant de l’art du Canada à l’échelle mondiale. « Les arts visuels au Canada restent un des domaines peu reconnus au niveau international, indique Hancherow, en ajoutant que l’art canadien de manière générale peut sembler sous-estimé et sous-évalué dans le monde entier. Néanmoins, je pense que cette situation est en train de changer. »

Il mentionne les grandes expositions réalisées par des artistes canadiens à Venise qui ont contribué à donner plus de visibilité à ces artistes. « En ce qui concerne l’art des Autochtones et des Inuits, je pense que le Canada fait davantage d’efforts pour le mettre en valeur en comparaison avec ce que font les autres pays colonialistes. Cette démarche va dans le bon sens », ajoute Hancherow. Elle va dans le sens de l’intérêt croissant pour les artistes noirs, autochtones ou de couleur. Sur ce sujet, il met néanmoins en garde sur le fait que cette évolution n’est pas forcément un indicateur d’une meilleure représentativité ou d’équité. « Bien que nous avons constaté un plus grand nombre d’artistes de couleur, d’artistes autochtones, d’artistes femmes dans le monde de l’art, le fossé reste grand, leurs œuvres d’art étant toujours moins bien reconnues que celles de leurs homologues masculins. »

En fin de compte, selon Hancherow, la notoriété croissante de l’art du Canada s’inscrit dans une histoire plus large, à l’origine des tendances qui redéfinissent le monde de l’art. Le monde de l’art devient plus inclusif, plus innovant, plus accessible et la nouvelle génération désireuse d’avoir un impact social est là pour y veiller.


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