Qu’est-ce qu’on considère être une perte de mémoire « normale » par rapport à ce qui relève de la démence ? 

Vieillir en santé
Au-delà de la richesse

Comprendre la démence et ce qui peut être fait pour stimuler la fonction cérébrale

Qu’est-ce qui est normal ? Qu’est-ce qui ne l’est pas ? Si vous rencontrez dans la rue quelqu’un que vous n’avez pas vu depuis un an et que vous ne parvenez pas à vous rappeler de son nom, cela relève de ce qui est « normal ». Si vous participez à une réunion de famille, que vous y retrouvez un proche parent que vous avez vu il y a une semaine et que vous n’êtes pas en mesure de vous rappeler de son nom, cela est manifestement anormal.
Dr Howard Chertkow, titulaire de la chaire en sciences cognitives, neurologie et innovation, et chercheur principal, Rotman Research Institute, Baycrest

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Orateur initial:

Bonjour, et bienvenue à Au-delà de la richesse avec votre animatrice, Leanne Kaufman, présidente et cheffe de la direction de RBC Trust Royal. Pour la plupart d’entre nous, parler de sujets comme le vieillissement, la fin de la vie et la planification successorale n’est pas facile. C’est pourquoi nous leur consacrons ce balado qui vous donne l’occasion d’en entendre parler tout en profitant des grandes connaissances de certains des meilleurs experts dans le domaine au pays. Aujourd’hui, nous voulons vous fournir des renseignements qui vous aideront à vous protéger, vous et votre famille, dans le futur. Voici votre animatrice, Leanne Kaufman.

Leanne Kaufman :

Nous enregistrons ce balado en janvier, qui est également le Mois de la sensibilisation à la maladie d’Alzheimer, qui sert réellement à souligner toutes les formes de démence et de déficience cognitive. Dans le cadre d’épisodes antérieurs de ce balado, nous avons discuté des statistiques stupéfiantes qui concernent le vieillissement des Canadiens et les impacts croissants qu’a la démence sur notre population. Bien qu’il existe une somme considérable d’informations sur le thème de la démence, il convient de souligner qu’il y a également énormément de désinformation. Du reste, tout le monde ne comprend pas que certains de nos facteurs de risque peuvent être contrôlables, y compris en ce qui concerne nos choix de mode de vie. C’est la raison pour laquelle je suis si heureuse de m’entretenir aujourd’hui avec notre invité, qui est ici pour nous aider à mieux comprendre ce sujet complexe, en plus de nous préciser quelles habitudes nous pouvons adopter dès aujourd’hui pour protéger nos fonctions cognitives en vue de l’avenir.

Bonjour, mon nom est Leanne Kaufman, et je vous souhaite la bienvenue au balado Au-delà de la richesse de RBC Gestion de patrimoine Canada. Je suis heureuse d’être accompagnée aujourd’hui du Dr Howard Chertkow, titulaire de la chaire en sciences cognitives, neurologie et innovation, et chercheur principal, Rotman Research Institute, Baycrest. Le long et fort impressionnant curriculum vitae du Dr Chertkow comporte un trop grand nombre de titres et de rôles pour que je puisse en dresser une liste exhaustive. Disons simplement que ses principaux domaines de recherche concernent le diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer et certaines de ses thérapies. Auteur prolifique, son expertise est fréquemment reconnue par d’autres chercheurs qui citent ses travaux. En fait, l’Université Stanford l’a classé dans le groupe du deux pour cent des chercheurs les plus cités de telle sorte qu’il ne fait aucun doute qu’il est extraordinairement bien placé pour traiter de ce sujet.

Dr Chertkow, je considère comme un honneur le fait que vous vous soyez joint à moi aujourd’hui pour discuter de certains des risques et des mythes, en plus de préciser ce que nous pouvons faire pour améliorer la santé de notre cerveau, en précisant pourquoi cela importe au-delà de la richesse.

Dr Howard Chertkow :

Merci, Leanne. Je suis ravi d’être ici avec vous pour parler d’un sujet que j’affectionne particulièrement. J’espère qu’il saura intéresser vos auditeurs.

Leanne Kaufman :

Je ne doute pas un instant que tel sera le cas. Ainsi donc, à l’intention de ces auditeurs, peut-être pourrions-nous justement commencer par brosser un aperçu général. Comment définissez-vous ce qu’est une perte de mémoire « normale » par rapport à ce qui tient de la démence et peut-être, pour élaborer sur ce sujet, auriez-vous la gentillesse de nous préciser certaines des causes et de nous décrire certains types de démence, en nous soulignant dans quelles circonstances il y a lieu de s’inquiéter lorsqu’un comportement « normal » est remplacé par un comportement qui, lui, pourrait peut-être nécessiter qu’on y porte une certaine attention sur le plan médical ?

Dr Howard Chertkow :

Voilà une excellente question. Nous parlons ici de vieillissement. La réalité est que nous vieillissons tous et que, manifestement, l’alternative n’est pas très réjouissante. Du reste, nous espérons tous être en mesure de continuer à vieillir et de bien vieillir. Cependant, comme chacun le sait, le vieillissement s’accompagne de changements et de modifications sur le plan de la rapidité avec laquelle nous nous déplaçons, de changements au niveau de notre vue, de changements qui touchent tous les aspects de notre corps. Sans compter que se produisent également des changements dont nous ne sommes pas conscients et de modifications au niveau de notre cerveau. De sorte que la question à se poser à vrai dire est la suivante : qu’est-ce qui constitue un vieillissement normal ? A priori, si l’on pourrait penser qu’il s’agit là d’une question simple, elle ne l’est cependant pas puisque nous comprenons désormais que certains des phénomènes dont nous pensions jadis qu’ils étaient normaux relèvent plutôt d’une maladie, et leur pathologie constitue en soi une forme de maladie. Il fut un temps où l’on considérait comme tout à fait normal d’être affligé d’une vision embrouillée en vieillissant. Nous savons aujourd’hui que ce phénomène est imputable à l’apparition de cataractes qui peuvent être traitées et que nous pouvons recouvrer une acuité visuelle encore meilleure qu’elle ne l’était lorsque nous avions 20 ans.

Qu’en est-il donc du vieillissement du cerveau ? Eh bien, surviennent des changements que la plupart des gens remarquent lorsqu’ils franchissent le seuil de la cinquantaine ou de la soixantaine. Prenons par exemple la situation qui consiste à dresser une liste d’articles que l’on souhaite acheter à l’épicerie. Lorsqu’on a 20 ans, on se rappelle de cinq, six ou sept de ces articles que l’on va se procurer à l’épicerie et que l’on ramène chez soi. Dans la cinquantaine ou la soixantaine, on commence à se faire la réflexion suivante : « Très bien, j’ai quatre de ces articles, mais quel était le cinquième, déjà ? » Ce phénomène relève de la mémoire épisodique, qui concerne la conservation de l’information. En vérité, nous ne sommes plus aussi habiles sur ce plan une fois le seuil de la cinquantaine ou de la soixantaine franchi que nous l’étions lorsque nous avions 20 ans.

Parlons maintenant de mémoire visuelle, qui sert par exemple à retrouver sa voiture dans un parc de stationnement. Il m’arrivait jadis de regarder par la fenêtre de mon bureau d’où je pouvais voir le parc de stationnement. Les jeunes médecins dans la vingtaine avaient pour habitude de sortir et de se diriger directement vers leur voiture. Qu’en était-il des médecins dans la soixantaine ? Ils se rendaient au parc de stationnement et y déambulaient un moment en s’employant à retrouver leur voiture, ce qui n’était pas désormais aussi facile pour eux. Il s’agissait en vérité de personnes qui s’estimaient être parfaitement normales et qu’on aurait qualifié de normales du fait qu’en vertu des normes il est habituel de se comparer à des gens de sa propre cohorte. Il est normal de connaître de légers déclins à l’égard de tous les aspects de ce qui constitue la mémoire épisodique.

Par ailleurs, il est intéressant de noter que certaines parties de notre cerveau fonctionnent mieux en vieillissant. Je fais ici référence à la mémoire sémantique : votre connaissance du monde, votre jugement et votre connaissance générale des choses sont meilleurs dans la soixantaine qu’ils le sont dans la vingtaine. Sans surprise, on pourrait considérer qu’il s’agit là d’un effet de la sagesse acquise au fil des ans. De telle sorte que ce n’est en fait qu’une partie de vos fonctions cérébrales et qu’une partie de vos fonctions propres à la mémoire qui sont normalement touchées.

Se pose donc la question suivante : qu’est-ce qui est normal ? En vérité, ce qui est « normal » varie considérablement. En effet, certaines personnes étaient dotées d’une parfaite mémoire lorsqu’elles avaient 20 ans et, à l’âge de 70 ans, leur mémoire demeure tout aussi parfaite. D’autres personnes se situent plutôt dans la moyenne et oublient des choses, voire un plus grand nombre de choses, en vieillissant. Ce que nous estimons relever de la perte de mémoire anormale tient vraiment de la situation clairement distincte qui fait en sorte qu’il s’avère désormais impossible de poser des gestes que l’on posait habituellement en raison de notre mémoire, et ce phénomène caractérise véritablement ce qu’est la démence, soit le déclin manifeste de notre mémoire. Les gens s’en plaignent. Nous les soumettons à des tests au sein de notre clinique de la mémoire et leurs résultats sont bien moins bons que ceux d’autres personnes de leur âge, et cette réalité a une incidence sur leur fonctionnement.

Cependant, le seuil de franchissement n’est pas clair et telle est la raison pour laquelle certaines personnes se tournent vers des tests en ligne qui permettent d’évaluer leur mémoire. Elles peuvent également s’adresser à leur médecin pour contrôler, en quelque sorte, leur mémoire. Cependant, je pense pour ma part que le seuil indiscutable consiste à déterminer si ce changement affecte votre fonctionnement. Il est possible de penser à des exemples de situations où des patients vous posent la question suivante : « Très bien, qu’est-ce qui est normal ? Qu’est-ce qui ne l’est pas ? » Si vous rencontrez dans la rue quelqu’un que vous n’avez pas vu depuis un an et que vous ne parvenez pas à vous rappeler de son nom, cela relève de ce qui est « normal ». Si vous participez à une réunion de famille, que vous y retrouvez un proche parent que vous avez vu il y a une semaine et que vous n’êtes pas en mesure de vous rappeler de son nom, cela est manifestement anormal. De sorte qu’il est ici question de nuances. Il est possible d’imaginer des situations où ce qui est normal devient peu à peu anormal, et c’est cette situation qui présente de l’intérêt pour nous puisque ce qui est anormal relève de la maladie.

Leanne Kaufman :

Donc, lorsque nous parlons de cette maladie et de la situation où nous avons peut-être franchi le seuil nous faisant passer de ce qui est normal à ce qui est anormal, quels sont certains des facteurs de risque, qu’ils soient contrôlables ou non, auxquels nous devrions porter attention si nous commençons à avoir l’impression de nous rapprocher de ce seuil ou si, par exemple, nous estimons que telle est la situation dans laquelle se retrouve un être cher ?

Dr Howard Chertkow :

Environ un cinquième des personnes qui ont plus de 70 ou 80 ans souffrent de démence ou sont affligées de pertes de mémoire légères ou importantes, ce qui n’est pas normal. De sorte que ceux qui ont tendance à voir le verre à moitié plein se diront que quatre personnes sur cinq se tirent bien d’affaire. Malgré tout, une personne sur cinq se retrouve bel et bien dans cette tranche anormale. Lorsque nous nous intéressons de plus près à ces gens, nous constatons que la moitié du risque lié au vieillissement du cerveau, au vieillissement anormal du cerveau en quelque sorte, nous constatons donc que la moitié du risque est d’origine génétique. Nous savons désormais que près de 85 gènes ont une incidence sur notre capacité de réflexion et sur notre mémoire en vieillissant. Certains de ces gènes, dans une proportion très minoritaire, présentent un caractère héréditaire autosomique dominant. Cela signifie que, si vous héritez de ce gène de l’un de vos parents, vous souffrirez de démence. Il s’agit là de ce qu’on appelle la démence familiale, qui est d’ailleurs très rare. Cependant, tous les autres gènes contribuent à rehausser quelque peu votre risque de telle sorte que l’effet est cumulatif. Dans l’ensemble, on estime donc que la moitié du risque est génétique, ce qui signifie que la moitié ne l’est pas. Du reste, il convient de tenir compte d’une liste croissante de facteurs non génétiques qui peuvent également contribuer à votre risque.

La catégorie la plus importante est celle des maladies vasculaires. Tout ce qui est néfaste pour votre cœur est néfaste pour votre cerveau. Nous savons tous ce qui se retrouve sur cette liste. Les responsables de la santé publique nous disent depuis longtemps comment prévenir les accidents vasculaires cérébraux, comment prévenir les maladies cardiaques, ce qui veut dire qu’il faut traiter l’hypertension artérielle, le diabète et le cholestérol, en plus de ne pas fumer et de ne pas être obèse. De surcroît, nous sommes conscients du fait que la surconsommation d’alcool s’inscrit également dans cette liste. Il s’agit donc là des risques vasculaires et telle est la raison pour laquelle je vais me permettre de revenir sur la chose la plus importante que vous pouvez faire, soit contrôler ces risques vasculaires et faire de l’exercice.

Les autres facteurs de risque, qui sont nombreux, sont tantôt prévisibles et tantôt étonnants. Parlons de ceux qui dorment mal. Si vous dormez moins de cinq heures par nuit, vous augmentez votre risque de souffrir de démence. Nous ne savions pas cela il y a 20 ans. Lorsque vous dormez, le flux sanguin qui alimente vos cellules cérébrales se transforme et permet d’éliminer les toxines qui se logent dans le cerveau. La démence s’explique en partie par l’accumulation de toxines dangereuses dans le cerveau, de protéines et d’autres produits chimiques qui endommagent les cellules cérébrales. Il faut donc dormir. Voilà un changement qui est relativement simple à envisager. Sans doute s’agit-il là du facteur de style de vie le plus simple que vous puissiez modifier. Si donc vous dormez moins de cinq heures par nuit, voire moins de six heures, vous devez ajouter une heure à votre sommeil. Cela sera extrêmement bon pour vous et je ne saurais suffisamment insister sur ce point.

Brossez-vous les dents et passez la soie dentaire. Quel est le rapport entre les dents et le cerveau, me demanderez-vous ? Eh bien, encore une fois, il y a 20 ans, nous pensions qu’il n’y avait aucun rapport entre les dents et le cerveau. Aujourd’hui, alors que nous commençons à comprendre le microbiome, c’est-à-dire les bactéries qui sont présentes dans notre bouche, dans notre estomac et dans notre intestin, nous savons que certaines bactéries présentes au niveau des gencives libèrent des toxines qui sont acheminées au cerveau. Les personnes qui utilisent la soie dentaire réduisent donc le risque de souffrir de démence par rapport à celles qui ne passent pas la soie dentaire, et nous pensons que ce phénomène s’explique par le contrôle qu’il est ainsi possible d’exercer au niveau de ces bactéries. Le conseil est donc le suivant : brossez-vous les dents et passez la soie dentaire – les bons conseils que vous prodiguait jadis votre mère étaient donc tout à fait fondés…

Nous parlions donc des toxines. J’ai évoqué le sujet des toxines qui pénètrent dans notre cerveau, et nous savons pertinemment que des toxines se trouvent dans l’alcool. L’alcool est toxique pour le cerveau. Il faut donc s’interroger sur la consommation abusive d’alcool. Quel est le seuil de consommation d’alcool souhaitable ? Ce sujet fait débat puisque la consommation de vin rouge en petite quantité apporte des antioxydants. Au moins une étude a démontré que les personnes qui consommaient un verre de vin ou un demi-verre de vin par jour profitaient d’une forme de protection au niveau des antioxydants. Cependant, la plupart des gens consommant plus que ces quantités doivent savoir que l’alcool est toxique pour le cerveau et nocif à long terme.

Si vous me posez la question : « Qu’en est-il du cannabis ? », il faut convenir du fait qu’on ne le sait toujours pas. À n’en pas douter, beaucoup de recherches démontrent que la consommation de cannabis a, à court terme, un effet sur la mémoire. À Toronto, Nathan Herrmann, médecin à l’hôpital Sunnybrook, a réalisé des études intéressantes avec la chercheuse Krista Lanctôt. Ils sont parvenus à démontrer que, lorsqu’on parvient à faire en sorte que des personnes qui consomment du cannabis quotidiennement mettent un terme à cette habitude, la capacité de leur mémoire s’améliore en quelques semaines à peine. Le problème consiste donc, comme c’est le cas de la plupart des aspects qui sont liés au mode de vie, à faire en sorte qu’elles puissent arrêter.

Passons maintenant à des aspects qui sont un peu moins faciles à maîtriser, comme le stress. Nous savons que le stress affecte le cerveau. Lorsque nous examinons les images du cerveau ainsi que de l’hippocampe des personnes qui ont souffert d’un syndrome de stress post-traumatique, nous constatons que la structure critique de la mémoire est plus petite. Tel est également le cas des personnes qui ont subi un stress très important. Combien de stress constitue un niveau trop élevé ? Voilà un aspect qui est difficile à évaluer puisque ce qui constituerait pour une personne donnée une source de stress pourrait relever de ce qui constitue un mode de vie agréable pour une autre personne. Il faut donc s’intéresser au stress. Si vous êtes trop stressé – et seul vous êtes en mesure de déterminer si tel est le cas –, il faut savoir que cela est mauvais pour votre cerveau.

Mais d’autres aspects sont des facteurs à plus long terme. Citons les personnes seules, les personnes dont le réseau social est moins étendu, les hommes célibataires d’âge moyen : à tous ces cas sont associés des risques de démence plus importants. Pourquoi ? Nous ne le savons pas. En vérité, nous savons que les hommes qui vivent sans conjointe ne prennent pas aussi bien soin d’eux-mêmes et, qu’en ce qui concerne leur régime alimentaire, leur santé vasculaire, leur consommation d’alcool, ils se trouvent dans une situation peu enviable. Mais en quoi la présence d’amis contribue-t-il à prévenir la démence ? Cela est vrai d’ailleurs non seulement des amis puisque des enquêtes ont été réalisées démontrant que les gens dont la vie semble avoir moins de sens alors qu’ils atteignent les seuils de la cinquantaine et de la soixantaine présentent un risque plus élevé de démence. Interviennent donc des facteurs sociaux qui constituent des raisons que nous ne comprenons pas vraiment, comme le fait d’avoir une vie sociale intéressante, de connaître des gens, de disposer d’un réseau, d’avoir une famille, tous ces facteurs contribuant à préserver votre cerveau en vieillissant.

Je me permettrai d’ajouter autre chose à cette liste qui, bien qu’elle soit longue, ne cesse de s’allonger. Les deux derniers aspects concernent l’alimentation puisqu’il semble évident que nous puissions poser des gestes concrets sur le plan de l’alimentation qui contribuent à protéger le cerveau, tandis que d’autres gestes à cet égard sont néfastes pour celui-ci. Les deux derniers aspects sont l’éducation. Une amélioration du niveau d’éducation, le fait d’être bilingue, trilingue ou d’avoir des activités cérébrales stimulantes protègent votre cerveau. Demeurer assis sur le canapé, ne pas bouger, a l’effet opposé. Peut-être la pollution constitue-t-elle également un facteur. Si vous vivez dans une zone très polluée… nous disposons désormais de plus en plus de preuves qui montrent que nous sommes alors exposés à un risque plus élevé de souffrir de démence. Dans quelle mesure le niveau de pollution doit-il être élevé, nous ne pouvons le dire clairement. Cependant, à Mexico, qui est une ville extrêmement polluée, nous observons des changements liés à la maladie d’Alzheimer dans le cerveau des sujets dans la vingtaine et dans la trentaine. Je pense donc que la pollution est un facteur très important.

Leanne Kaufman :

Je dresse dans mon esprit ma propre petite liste des choses que je peux contrôler et de celles qui échappent à mon contrôle. Je ferais valoir que c’est l’aspect du sommeil que j’aimerais parvenir à maîtriser, mais j’ai parfois l’impression qu’il échappe à mon contrôle. Il existe probablement certains mythes ou idées fausses en ce qui concerne la prévention ou les causes. Vos recherches et votre expérience vous ont-ils appris l’existence de choses dont on estimait jadis qu’elles pouvaient constituer une mesure de prévention ou une cause et dont il a désormais été établi que cela n’était pas le cas ?

Dr Howard Chertkow :

Eh bien, je dois avouer que beaucoup de facteurs font l’objet de débats. Nous pensions jadis que l’aluminium et peut-être les antisudorifiques à base d’aluminium ou les pots en aluminium pouvaient causer la maladie d’Alzheimer. Il semblerait qu’une telle éventualité soit de moins en moins probable. Il y a cependant un certain nombre de gens qui estiment que l’exposition aux métaux peut faire une différence, et cette question en soi complexe. On parle aussi de déterminisme génétique. Certaines personnes tiennent des propos tels que les suivants : « Écoutez, ma mère a souffert de la maladie d’Alzheimer. Comme je ressemble à ma mère, je vais l’avoir. » Ce n’est pas de cette façon que fonctionne la génétique. Si se trouvent dans votre famille des antécédents, cela signifie que votre mère a eu la maladie d’Alzheimer, ce qui double votre risque de développer cette maladie, par rapport au reste de la population. Vous vous rappellerez que j’ai déjà indiqué qu’une personne sur cinq était atteinte de démence ou souffrait de légères pertes de mémoire. Si votre mère a souffert de la maladie, votre risque s’en trouve doublé, mais cela ne signifie pas pour autant que vous l’aurez assurément. De sorte que beaucoup de gestes peuvent encore être posés. Nous sommes d’avis que, si les gens devaient modifier leur style de vie, il serait peut-être possible de prévenir 40 pour cent des cas de démence. Il y a donc énormément de choses que nous puissions faire.

Leanne Kaufman :

Formidable. Si je peux me permettre d’élaborer sur ce point, si vous pouviez choisir les trois gestes les plus importants qu’il serait possible de modifier facilement – comme le fait de changer de domicile pour s’éloigner d’une zone affligée d’un haut niveau de pollution pourrait ne pas être si simple –, auriez-vous la bonté de nous faire part de trois gestes que nous pourrions tous entreprendre de poser dès demain pour nous protéger dans l’avenir ?

Dr Howard Chertkow :

Eh bien, l’exercice figure en tête de liste. Dans toutes les études, l’exercice s’impose comme étant le facteur de risque modifiable le plus indiscutable. Combien faut-il faire d’exercice? Eh bien, les recommandations en matière de santé cardiaque nous invitent à faire 150 minutes d’exercice modéré par semaine. Par exercice modéré, on entend de l’exercice qui vous amène à transpirer quelque peu. Voilà qui devrait constituer un objectif atteignable pour pratiquement tous les citoyens. L’exercice tient pratiquement de la magie. Dans les études, il a été démontré que l’exercice permettait de rajeunir de cinq ans l’âge de notre cerveau, de réduire les toxines, d’augmenter le flux sanguin et, à n’en pas douter, l’exercice est une pratique qui ne cesse de présenter des bénéfices.

Quels sont les deuxième et troisième gestes dont je pourrais vous faire part ? Voilà la question fondamentale et, pour être bien honnête, nous ne savons pas précisément comment se classent par ordre de priorité les autres facteurs. Car, à dire vrai, bien que nous possédions des connaissances tirées d’études de populations portant sur les relations entre ces facteurs, personne n’a vraiment réalisé d’essais contrôlés appropriés. Ces essais sont très difficiles à mener. À Baycrest, nous avons lancé un nouveau centre, le Kimel Centre, où nous allons en fait nous efforcer de réaliser des recherches appropriées sur l’impact susceptible de découler d’une modification du régime alimentaire, des habitudes en matière de sommeil, voire si quelqu’un entreprend d’utiliser la soie dentaire. Dans quelle mesure ces gestes pourraient-ils vraiment permettre de réduire les risques ? Voilà qui constitue une question importante.

Ainsi donc, au-delà de l’importance que revêt l’exercice, il faut également tenir compte du caractère personnalisé de la démarche. Certaines personnes ne peuvent changer quoi que ce soit parce qu’elles font déjà tout ce qui s’avère nécessaire. Je pense que, plutôt que de se demander quels sont les trois gestes les plus importants, chacun devrait prendre connaissance de cette liste et se demander quelles sont les trois habitudes que je pourrais changer. L’une de ces habitudes/mesures concerne le régime alimentaire. Nous disposons déjà de preuves tout à fait intéressantes qui démontrent que le régime méditerranéen et le régime MIND sont bénéfiques pour la santé cérébrale. Il s’agit de régimes qui prévoient une réduction de la consommation de viande rouge, une augmentation de la consommation de légumes verts, de pâtes, de fruits – notamment de fruits comme les oranges, qui sont riches en antioxydants –, de poissons d’eau froide comme le saumon, et qui prônent la modération, en se débarrassant de l’obésité et en augmentant les quantités de protéines consommées tout en réduisant celles de sucre et de viande rouge. Pour une foule de raisons, ces régimes alimentaires sont bénéfiques pour le cerveau. L’autre aspect consiste à inclure des flavonoïdes. Il s’agit là de produits chimiques que l’on retrouve dans les baies, les baies très colorées comme les framboises, les fraises ou le chocolat noir. Tous ces produits contiennent des flavonoïdes. Et des études valables menées, encore une fois, principalement chez l’animal, démontrent que cela permet de préserver notre cerveau du vieillissement tout en réduisant les risques de démence.

Leanne Kaufman :

Je suis ravie si vous me dites que le fait de consommer un verre de vin et de manger du chocolat noir sera bénéfique pour ma santé. Voilà qui constitue toujours une excellente nouvelle. En fait, nous pourrions consacrer énormément de temps à l’analyse de tous ces facteurs de risque et plonger plus avant dans tous ces détails, mais en vérité, dans le cadre des échanges que nous avons aujourd’hui, notre objectif est simplement d’effleurer la surface de ce sujet. Ainsi donc, si vous formuliez le souhait que les personnes qui nous écoutent ne retiennent qu’un aspect des propos que nous avons échangés aujourd’hui, de quoi s’agirait-il ?

Dr Howard Chertkow :

Eh bien, peut-être serait-il préférable de… en fait, je mentionnerai plutôt deux choses. Je pense que nous devons commencer à nous représenter notre cerveau comme jouant un rôle équivalant à celui qu’assume le quart arrière dans une équipe de football. Vous devez renforcer les aspects qui protègent votre cerveau. Vous disposez d’une série de facteurs qui vous défendent et vous devez réduire le nombre d’attaques dont votre cerveau peut faire l’objet. Ainsi donc, chacun peut intervenir à divers égards. Je pense que nous pourrions parler des clubs de lecture en marchant. Voilà qui est idéal : un club de lecture. Qu’est-ce qui caractérise les clubs de lecture ? Les clubs de lecture sont une source de stimulation intellectuelle. Par ailleurs, si vous marchez, vous faites de l’exercice. Si vous participez à un club de lecture, vous êtes stimulé sur le plan social. Tels sont dont les trois aspects sur lesquels nous pourrions nous pencher pour améliorer notre vie.

Par ailleurs, nous devons protéger notre cerveau de la même façon que nous protégeons notre cœur. À l’heure actuelle, nous disposons d’une telle quantité de preuves en ce qui concerne le tabagisme que je ne doute pas que chacun sait désormais que fumer est mauvais pour le cœur. Cependant, fumer est également mauvais pour le cerveau.

Je pense que ce sur quoi il y a lieu de réfléchir est l’aspect dont je n’ai pas parlé, qui tient à la motivation pour changer. Voilà un autre domaine à l’égard duquel, en tant que scientifiques, nous tentons d’en apprendre plus. Il n’est pas facile de modifier son mode de vie. Et quelle est l’astuce, quelle est la formule qui pourrait amener chacun à modifier son style de vie ? Comment chacun trouve-t-il la motivation d’apporter ces changements dont il sait qu’ils s’imposent ? Cet aspect tient un peu du mystère… Les psychologues s’y intéressent et peut-être se peut-il fort bien que la réponse ne soit pas universelle. Cependant, trouver sa propre motivation pour changer représente indiscutablement un élément essentiel du processus, puisque chacun peut bel et bien consigner sur papier une liste de choses qu’il souhaite modifier, et chacun prend des résolutions à l’occasion du Nouvel An, mais nous savons pertinemment bien que ces résolutions ne sont tenues que pendant environ un mois. Tel est donc l’aspect essentiel : chacun doit tenter de déterminer ce qu’il faut pour se motiver à apporter des changements dans sa vie.

Leanne Kaufman :

Voilà une excellente façon de mettre fin à notre discussion. Vous savez que vous venez de toucher une autre corde sensible en ce qui me concerne puisque je me réjouis de ce que vous avez dit au sujet du chocolat noir, je me réjouis également de votre conseil en ce qui concerne le verre de vin, tout comme c’est le cas en ce qui concerne le club de lecture. Je vais suggérer aux filles qui font partie de mon club de lecture – que je tiens à saluer du même coup – de commencer à marcher. Cependant, cela pourrait faire en sorte qu’il soit un peu plus difficile de consommer notre vin… nous devrons donc prendre une décision quant à l’aspect que nous retiendrons. J’aimerais vous remercier, Dr Chertkow, de vous être joint à moi aujourd’hui pour parler de la démence, de sa prévention ainsi que des tactiques que nous pouvons tous mettre de l’avant, en précisant pourquoi tout cela importe au-delà de la richesse.

Dr Howard Chertkow :

J’ai été ravi de passer un moment avec vous.

Leanne Kaufman :

Vous pouvez en apprendre plus sur le Dr Chertkow en vous rendant sur le site Baycrest.org (en anglais). Si vous avez aimé cet épisode du balado et si vous souhaitez contribuer à l’appuyer, nous vous invitons à en faire part à d’autres personnes, en parler sur les médias sociaux ou à donner une note et à rédiger une critique. Mon nom est Leanne Kaufman. Au plaisir de vous retrouver. Merci de vous être joints à nous.

Orateur final :

Qu’il s’agisse de planifier votre succession ou les besoins de votre famille ou de votre entreprise, ou de bien remplir votre rôle d’exécuteur testamentaire (appelé liquidateur au Québec) de la succession d’un être cher, nous pouvons vous guider, aplanir les difficultés et soutenir votre vision. Faites équipe avec RBC Trust Royal afin que les générations futures profitent longtemps de votre legs. Laissez un héritage, pas un fardeau™. Allez à rbc.com/trustroyal.

Merci d’avoir suivi cet épisode d’Au-delà de la richesse. Pour en savoir plus sur RBC Trust Royal, veuillez visiter notre site à rbc.com/trustroyal.


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