La zone grise de la démence

Vieillir en santé
Au-delà de la richesse

Apprenez à reconnaître et à gérer les premiers signes de démence chez vos proches.

« Un jour, c’est moi qui ai pris livraison du courrier, et j’y ai découvert des lettres d’institutions bancaires, de sociétés de cartes de crédit, de même que d’amis à qui il avait emprunté de l’argent. Il ne m’avait jamais dit mot de tout cela. En vérité, il a longtemps manœuvré avec brio. »
Nancy Carlson, auteure et illustratrice de livres pour enfants

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Leanne Kaufman :

Selon la Société Alzheimer du Canada, d’ici 2030, près d’un million de personnes souffriront de démence au Canada. Le déclin cognitif commence souvent longtemps avant qu’un diagnostic formel ne soit posé. Et cette période durant laquelle apparaissent de subtils changements peut être une véritable source de confusion et de risque, notamment en matière financière et juridique. Les familles se demandent parfois si ces changements de comportement sont normaux. Malgré tout, cette étape est rarement évoquée, de nombreuses personnes devant s’y confronter seules.

Bonjour, mon nom est Leanne Kaufman, et je vous souhaite la bienvenue au balado Au-delà de la richesse de RBC Gestion de patrimoine – Canada. J’ai le plaisir d’être accompagnée de Nancy Carlson, auteure et illustratrice de livres pour enfants, qui a réalisé plus de 60 ouvrages. Sa vie a pris une tournure inattendue lorsque son conjoint depuis plus de 30 ans, a commencé à prendre de mauvaises décisions financières, les contraignant à vendre leur maison et pratiquement tous leurs biens. Ce n’est que plus tard que fut trouvée une explication pour ce comportement inhabituel et imprudent, lorsque fut diagnostiquée une forme de démence précoce. Aujourd’hui, Nancy parle de son parcours pour aider les autres à reconnaître les signes avant-coureurs et à gérer ces difficultés. Merci de partager votre expérience, en précisant pourquoi cette question importe au-delà de la richesse.

Nancy Carlson :

Merci. Je suis ravie de partager mon parcours.

Leanne Kaufman :

Nous savons que le déclin cognitif n’est pas linéaire et qu’il débute souvent par de subtils changements, comme le fait d’égarer des objets, d’avoir du mal à trouver ses mots et de manquer parfois de jugement. Pourriez-vous nous parler de ce qui s’est passé lorsque vous avez commencé à observer des changements dans le comportement de votre mari ? Quels sont les premiers indices qui ont éveillé vos soupçons ?

Nancy Carlson :

Au début, les changements furent très subtils. Sa forme de démence, la démence fronto-temporale (DFT), est un peu particulière. Elle affecte le lobe frontal du cerveau, qui loge nos fonctions exécutives et notre personnalité. La première chose que vous remarquez chez une personne atteinte de cette forme de démence est qu’elle devient plutôt désorganisée. Ses fonctions exécutives sont touchées… et sa personnalité change. Mon mari gérait ma carrière. Il organisait mes visites scolaires, il s’occupait de mes contrats, et j’ai réalisé qu’il ne se débrouillait pas bien. Il s’est mis à dos certains de mes éditeurs et, au tout début, tout cela était très subtil. J’ai fini par lui dire qu’il devait trouver un travail car il ne s’acquittait pas bien de ses responsabilités envers moi. Lui qui était jadis si bien organisé perdait ses compétences organisationnelles… Et puis, un autre aspect de sa personnalité a changé. Son affect était émoussé. Cette réalité présentait un aspect plutôt inédit et nous avons d’ailleurs appris à rire de certains de ces comportements. Par exemple, il s’est mis à enchaîner les petits-déjeuners. Lorsque je lui disais qu’il venait de prendre son petit-déjeuner, en lui demandant pourquoi il mangeait encore, il me répondait qu’il avait faim. D’une part, il ne pouvait pas se rappeler qu’il venait de manger et, d’autre part, cette partie de son cerveau ne lui communiquait pas le sentiment de satiété. Elle l’invitait à manger sans cesse… Mais je pense que c’est l’aspect de l’organisation auquel il faut être le plus attentif chez votre conjoint. Si votre conjoint commence à devenir totalement désorganisé, il y a un problème.

Leanne Kaufman :

Comment avez-vous géré ces premiers échanges, si ce n’est de lui demander pourquoi il enchaînait ses petits-déjeuners ? Comment avez-vous entrepris de lui parler des changements que vous observiez ?

Nancy Carlson :

Excellente question. Si seulement j’avais une machine à remonter le temps… J’étais tout le temps en colère… J’ai tenu pour acquis que, comme il approchait la fin de la soixantaine, il traversait une crise propre à son âge. Plutôt que de m’attarder au problème et de le comprendre, au début, j’étais irritée et en colère. Comme je suis une vraie Scandinave du Minnesota, je sais classer certaines choses quelque part dans mon cerveau et ne pas m’en soucier. C’est ainsi que j’ai réagi. Ce qui fut une énorme erreur. Car j’aurais pu m’en rendre compte plus tôt. J’ai plutôt rangé cet état de fait dans un placard et je n’en ai pas tenu compte, me bornant à poursuivre mon activité d’auteure et d’illustratrice. J’ai commis là une grave erreur. Je me disais que les choses se régleraient d’elles-mêmes.

Leanne Kaufman :

Nous avons fait allusion au fait que cette situation a eu des conséquences financières désastreuses pour vous, semblerait-il, pour votre carrière. Pourriez-vous nous en dire plus sur certaines de ces situations ou décisions que vous souhaiteriez avoir gérées différemment avec le recul du temps en ce qui concerne les aspects financiers ou juridiques de votre vie ?

Nancy Carlson :

Mon mari s’occupait des questions administratives et financières. Je signais les documents qu’il me présentait. Sans poser de questions. Grave erreur. Je ne me suis pas comportée comme une véritable partenaire dans notre vie financière. Je me suis contentée de le laisser la gérer. Il préparait nos déclarations de revenus, que je signais, au moment voulu. Il rencontrait ensuite le fiscaliste, mais il a omis de payer nos impôts pendant 10 ans. Ce que je ne savais pas. Cependant, j’en assume la responsabilité en tant qu’épouse qui l’a laissé gérer tous les aspects commerciaux de notre vie. Sans que je pose de questions. J’ai commencé à en poser lorsqu’un jour… Au début de sa DFT, Barry avait pris l’habitude d’attendre le facteur. Nous travaillions tous deux à la maison et il était toujours là lorsque le facteur arrivait. Il prenait le courrier sans que j’y accorde la moindre importance. Je me disais qu’il s’ennuyait et qu’il avait peut-être hâte d’y découvrir un chèque… C’est ainsi que je voyais la situation. Mais, il me cachait des choses. Malgré son trouble, il savait qu’il devait me cacher des choses, faute de quoi je serais fâchée contre lui. Un jour, c’est moi qui ai pris livraison du courrier, et j’y ai découvert des lettres d’institutions bancaires, de sociétés de cartes de crédit, de même que d’amis à qui il avait emprunté de l’argent. Il ne m’avait jamais dit mot de tout cela. En vérité, il a longtemps manœuvré avec brio. Si j’avais intercepté le courrier plus tôt, peut-être aurais-je découvert le pot aux roses. Mais ma carrière m’amenait à me déplacer souvent, à quitter la maison pendant des semaines, sans compter les tournées de promotion de mes livres. On comprendra que tout cela m’ait échappé jusqu’au jour où il s’est retrouvé dans une situation où il ne pouvait plus me cacher la vérité. Son bureau donnait l’impression qu’une bombe avait explosé à proximité alors que, jadis, chaque chose était bien à sa place. Il était désormais totalement dispersé. Les factures n’étaient pas payées. Suivant les conseils d’une amie avocate, j’ai entrepris des démarches pour trouver un neurologue.

Leanne Kaufman :

Pourriez-vous élaborer un peu ? Dites-nous quels ont été certains des premiers gestes que vous avez posés pour protéger Barry et votre famille après avoir réalisé que quelque chose n’allait pas.

Nancy Carlson :

J’ai expliqué à mon amie que nous avions de lourdes dettes. Elle m’a répondu que la situation ressemblait à celle dont avait été victime son père, affligé d’une maladie similaire à la DFT. Elle m’a conseillé de consulter un neurologue. C’est alors que je suis devenue proactive sur le plan financier, en plus de m’employer à le protéger. Il a reçu un diagnostic de DFT. Grâce à mon amie, je suis immédiatement allée faire signer une procuration, document dont je ne connaissais même pas l’existence. Cette amie m’a aussi dit ce que je pouvais faire pour nous protéger. Mais, comme vous le savez, ici, aux États-Unis, il est impossible de se protéger de l’Internal Revenue Service, de telle sorte que j’ai dû élaborer un plan pour parvenir à rembourser cette agence.

Nancy Carlson :

Nous avions déjà vendu notre maison avant son diagnostic. J’avais alors réalisé que nous avions deux hypothèques et non seulement une. J’allais de surprise en surprise. Avec le recul, tout cela ressemble à un long cauchemar parsemé d’embuches… Vous savez, je suis dessinatrice. Je connais à peine les tables de multiplication. Pour moi, les finances et ce genre de choses, ce n’est pas évident.

Et la situation fut encore plus dure pour Barry, puisqu’il était suffisamment lucide pour se rendre compte qu’il n’était plus apte. Et son état s’est aggravé. Mais un aspect positif de la DFT est que les victimes ne se rendent pas vraiment compte de leur état. Peut-être le comprennent-elles au tout début, mais elles l’oublient. Alors que les personnes qui souffrent de la maladie d’Alzheimer sont plus conscientes de leur déclin. En l’espèce, une fois que mon mari m’a confié la responsabilité des finances, il ne s’en est plus soucié. Et il ne pensait même pas que cela était problématique. Tant mieux pour lui en quelque sorte…

Leanne Kaufman :

Quel conseil donneriez-vous donc aux autres familles qui pourraient remarquer des changements auprès de leurs proches, de sorte qu’elles puissent mettre en place des mesures de protection plus tôt, voire le plus tôt possible ?

Nancy Carlson :

Il faut s’attarder à l’aspect de la désorganisation. Ce qui est aussi vrai dans le cas de la maladie d’Alzheimer. Si votre être cher était jadis bien organisé mais ne l’est plus, si les choses semblent lui échapper, vous devez le confronter, faire preuve de courage et obtenir un diagnostic. S’il y a un problème, il est préférable de le détecter rapidement. Plutôt que de vous fâcher, prenez les choses en main.

Leanne Kaufman :

Espérons que votre histoire et le message que vous partagez publiquement permettront à d’autres de ne pas se retrouver pas dans la même situation. Peut-être pourrions-nous parler un peu de vous à titre d’aidante. Non seulement devez-vous aujourd’hui gérer toutes ces questions d’ordre financier, mais vous devez aussi, vraisemblablement, faire face à la réalité : vous êtes désormais l’aidante naturelle de votre mari. Et peut-être devez-vous faire votre deuil de qui il fut jadis, alors sa personnalité se transforme. Comment vous êtes-vous occupée de vous au fil de ce parcours ? Quel conseil donneriez-vous à d’autres personnes qui se retrouvent dans une telle situation ?

Nancy Carlson :

Je me suis occupée de moi-même. J’ai tenu un blogue sous forme de textes et de dessins. On pourrait se demander pourquoi j’ai souhaité écrire à propos d’un tel sujet. Mais cette démarche m’a aidée à comprendre ce que je ressentais et à nous pardonner tous les deux pour ce que nous avons vécu. Cela m’a aidé à m’y retrouver. Quiconque a un penchant créatif, aime écrire un peu de poésie, voire tricoter… peu importe, trouvez quelque chose que vous aimez. Je me suis aussi adonnée à la randonnée. Cette activité me permet de me retrouver quelques heures seule dans le bois, et cela m’aide à réfléchir. J’ai aussi adhéré à un groupe de soutien et cela fut très important. J’ai beaucoup appris en matière de finance. Ce groupe m’a notamment permis de découvrir les soins de jour. Le simple fait de rencontrer des gens qui vivaient la même chose m’a vraiment aidée. À vrai dire, je ne suis pas une adepte de ce genre de groupes de soutien. Je n’aime pas parler de mes problèmes, mais je dois reconnaître que ces groupes ont été très utiles. J’y ai rencontré d’excellents amis dont certains ont vécu les mêmes mésaventures que moi sur le plan financier. Comme moi, ces personnes ont appris à s’y retrouver et elles peuvent être utiles aux autres. Donc, adhérer à un groupe de soutien m’a beaucoup aidée, au même titre que la randonnée et la création.

Leanne Kaufman :

Voilà d’excellents conseils pour quiconque est appelé à jouer un rôle d’aidant. Qu’il soit question de créativité, du lien avec la nature ou avec autrui. Le volet financier nous rappelle certains des messages que nous tentons de communiquer à nos clients ainsi qu’à la population canadienne au sujet de l’importance de bien planifier avant que ne survienne une crise. Avec un peu de chance, les personnes qui nous écoutent pourront retenir certains de ces conseils et s’assurer de disposer de documents, comme une procuration, bien avant qu’une crise ou que des événements comme ceux que vous avez vécus ne surviennent. Si vous souhaitiez que les personnes qui nous écoutent ne retiennent qu’une seule chose de l’entretien que nous avons eu aujourd’hui vous et moi, de quoi s’agirait-il ?

Nancy Carlson :

La principale conclusion que je retiens est la suivante : posez des questions et devenez le partenaire de votre conjoint en matière financière. Je ne l’ai pas fait. Je ne saurais vous dire combien de fois nous avons rencontré notre comptable, alors que je me contentais de rêvasser en regardant par la fenêtre, en me demandant ce que je faisais là. Je regrette de lui avoir imposé ce fardeau. Devenez un partenaire à part entière de votre conjoint en ce qui concerne votre vie financière.

Leanne Kaufman :

Excellent conseil. Je vous remercie, Nancy, de nous avoir donné un bref aperçu de cette période de votre vie, et de nous avoir fait part des leçons que vous avez apprises et en nous soulignant en quoi cette question importe au-delà de la richesse.

Nancy Carlson :

Merci beaucoup de m’avoir invitée.

Leanne Kaufman :

Apprenez-en plus sur Nancy Carlson à nancycarlson.com.Si vous souhaitez appuyer notre balado, parlez-en à d’autres ou sur les médias sociaux, ou encore donnez une note et rédigez une critique de cet épisode. Mon nom est Leanne Kaufman. J’ai hâte de vous retrouver. Merci d’avoir été des nôtres.

Conclusion du présentateur :

Qu’il s’agisse de planifier votre succession ou les besoins de votre famille ou de votre entreprise, ou de bien remplir votre rôle d’exécuteur testamentaire (appelé liquidateur au Québec) de la succession d’un être cher, nous pouvons vous guider, aplanir les difficultés et soutenir votre vision. Faites équipe avec RBC Trust Royal afin que les générations futures profitent longtemps de votre legs. Laissez un héritage, pas un fardeau.MC Visitez le site rbc.com/royaltrust.

Merci d’avoir été des nôtres pour cet épisode de Au-delà de la richesse. Pour en savoir plus sur RBC Trust Royal, visitez notre site Web à rbc.com/royaltrust.


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