La Fed a souvent été prompte à réduire les taux pour soutenir l’économie en période de ralentissement. Nous examinons pourquoi la Fed pourrait rester sur la touche plus longtemps que certains investisseurs pourraient l’espérer en raison des pressions inflationnistes potentielles et de l’incertitude politique.
24 avril 2025
Par Atul Bhatia, CFA
Au cours des 20 dernières années, l’établissement de la politique monétaire des États-Unis a été davantage un jeu de dames qu’un jeu d’échecs. Les règles étaient simples : si l’économie recule, on abaisse les taux; si une crise frappe, on porte les taux à zéro; si la crise se prolonge; on achète des obligations du gouvernement américain. La seule fois où l’inflation s’est révélée être un grave problème, celui-ci était tout de même simple. La Réserve fédérale américaine (Fed) pouvait jouer au méchant policier et relever les taux, étant donné que le gouvernement fédéral mettait en œuvre d’importantes mesures de relance.
Dans ce contexte, il est compréhensible que certains investisseurs pensent que la Fed viendra encore une fois à la rescousse si, comme nous nous y attendons, la croissance économique ralentit jusqu’à la fin de l’année. Nous croyons que c’est cet état d’esprit qui fait en sorte que les contrats à terme sur taux d’intérêt indiquent une quasi-certitude que la Fed réduira les taux au moins une fois, et possiblement deux fois, d’ici juillet, ce qui s’ajoute aux réductions totalisant 100 points de base (pb) l’an dernier.
Aussi tentant que ce point de vue puisse être, nous pensons que les prochaines réunions de la Fed seront tout sauf simples et que les investisseurs devraient se préparer à une approche plus réfléchie de l’établissement des taux par la Fed que ce qui est actuellement pris en compte. Une intervention plus lente de la Fed pourrait créer de la volatilité, mais nous croyons qu’une telle approche sera ultimement avantageuse pour l’économie et les marchés.
Le problème ici est que la Fed devrait subir des pressions des deux volets de son mandat : le plein-emploi et la stabilité des prix. Si les prévisions – y compris les nôtres et celles de plusieurs autres grandes banques – sont exactes, la croissance restera essentiellement stable jusqu’à la fin de l’année, les prix à la consommation augmentant à un taux annuel de près de 4 %.
L’idée que la Fed procédera à des réductions de taux « préventives » – que nous définissons comme une baisse des cibles de taux du financement à un jour lorsque l’inflation est supérieure à 3 % – est problématique, selon nous, sur au moins trois fronts :
En fin de compte, nous entrevoyons plusieurs risques – et potentiellement des avantages limités – pour la Fed de réduire les taux de façon musclée pendant que l’inflation et les attentes d’inflation sont élevées.
Une autre difficulté pour la Fed dans l’élaboration de ses politiques selon l’orientation de l’économie est que les intrants essentiels changent à une vitesse presque sans précédent. Nous croyons que les droits de douane en sont l’exemple évident, une pause sur les droits de douane dits réciproques (qui peuvent à certains niveaux changer la donne) ayant été décrétée. L’impulsion de croissance des États-Unis semble très différente si cette pause aboutit à des accords commerciaux négociés que si la plupart des droits de douane dits réciproques sont finalement imposés.
Cette incertitude pose une importante difficulté à la Fed. Si elle prend des mesures pour réduire les taux avant la publication des données en raison des droits de douane élevés, la justification de cette réduction pourrait être neutralisée par une décision politique subséquente. Si l’on va à l’extrême, cette situation pourrait l’inciter à passer de baisses de taux à des hausses de taux en très peu de temps, peut-être en une ou deux réunions.
L’objectif institutionnel ultime de la Fed consiste à inspirer confiance tant dans l’économie dans son ensemble que dans la valeur du dollar. Les changements rapides de politique ne favorisent pas le renforcement de la confiance, et nous pensons que la banque centrale préférera attendre et être certaine plutôt que d’agir rapidement en raison des sables mouvants de la politique budgétaire.
Selon nous, deux trajectoires s’offrent à la Fed pour abaisser les taux.
La première est un repli des attentes d’inflation qui rassure la Fed et fournit un argument convaincant en faveur d’une baisse des taux, même si les dernières données sur l’inflation sont supérieures à la cible. Les seuils de déclenchement des mesures réels dépendront de l’interaction du chômage, des indicateurs de croissance économique avancés, de l’inflation actuelle et des attentes d’inflation – nous assistons certainement à une partie d’échecs, et non de dames –, mais nous pensons que les attentes d’inflation contenues sont un prérequis pour agir rapidement.
La deuxième trajectoire consisterait probablement à attendre que le ralentissement de la croissance et la hausse du chômage freinent l’inflation et forcent la Fed à agir. Dans ce cas, nous nous attendons à ce que le lent départ soit accompagné de mesures plus musclées, la Fed étant disposée à envisager des mesures plus importantes, comme elle l’a fait au cours du cycle de réduction de l’an dernier.
Pour les investisseurs, nous entrevoyons le risque qu’ils perçoivent une Fed qui ne réduit pas ses taux aussi rapidement que prévu comme la perte d’un appui, ce qui pourrait susciter de la volatilité à court terme. Nous croyons que ce point de vue sous-estime les défis auxquels la banque centrale est confrontée et que la trajectoire la plus favorable à long terme devrait être de se concentrer sur l’inflation et les attentes d’inflation.
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