La Maison-Blanche a interprété de façon large le pouvoir législatif actuel consistant à prendre des décisions politiques unilatérales. Nous examinons comment cette prise de décisions ponctuelles centralisées soulève des préoccupations structurelles et comment le cadre de politique économique peut évoluer.
13 novembre 2025
Par Atul Bhatia, CFA
Au cours des derniers mois, l’administration Trump a pris ou mis en œuvre des mesures qui ont resserré les liens entre le gouvernement américain et les entreprises privées. Elles vont des investissements directs dans certains fabricants de puces et sociétés minières aux États-Unis à la participation aux revenus liés aux exportations d’actifs stratégiques. De façon moins directe, l’administration a cherché à utiliser les tarifs douaniers pour influencer la gestion de la chaîne d’approvisionnement dans l’ensemble du secteur privé.
Des commentateurs de gauche et de droite du spectre politique ont critiqué ces décisions, les qualifiant de « sans précédent » et de « mesures gouvernementales excessives ».
À notre avis, ces commentaires ciblent les étiquettes plutôt que la réalité, ignorent le contexte important et, surtout, se concentrent trop sur les préoccupations d’aujourd’hui tout en écartant les répercussions importantes pour les futures mesures du gouvernement.
À strictement parler, nous ne considérons pas ces mesures comme sans précédent.
Par le passé, les États-Unis ont pris des participations dans des entités privées, tout récemment en réaction à la crise financière mondiale, et ont même exploité directement des actifs privés, comme lorsque le président Harry S. Truman a décidé de prendre possession d’aciéries pendant la guerre de Corée.
L’idée de l’administration Trump de prendre une part des bénéfices sur les ventes de puces exportées en Chine, permises depuis peu, présente moins d’analogies directes, mais il s’agit largement d’une question de forme. Depuis des décennies, le gouvernement américain utilise les ventes d’armes à l’étranger pour réduire le coût par unité des principaux systèmes d’armes utilisés par l’armée américaine. C’est une structure différente d’une entente de partage des revenus, mais le résultat net pour le Trésor américain est le même : plus de permis d’exportation, plus de liquidités dans la banque.
La question de mesures excessives du gouvernement est plus politique qu’économique. Les gens raisonnables peuvent certainement critiquer les deux côtés des compromis économiques et stratégiques liés à la propriété gouvernementale d’actifs productifs dans des secteurs clés.
De façon plus générale, toutefois, nous croyons que la question du caractère excessif déforme la relation existante entre le gouvernement fédéral et les sociétés privées aux États-Unis. En particulier, elle néglige les nombreuses façons dont les pouvoirs gouvernementaux de longue date équivalent à une participation partielle des États-Unis dans de nombreuses activités privées.
Prenons les investisseurs individuels qui achètent des actions. Pour ces actionnaires, les droits et privilèges se résument en grande partie à une participation en pourcentage aux bénéfices de la société, à un droit de vote concernant les principales décisions de la société et à un droit de vote lors de l’élection du conseil d’administration, qui embauche la direction et protège les intérêts des actionnaires.
Le gouvernement américain est-il vraiment dans une position très différente? Les similarités abondent :
Tout compte fait, les États-Unis n’ont peut-être pas une participation explicite dans des sociétés privées, mais l’ensemble de droits et de pouvoirs dont ils disposent les placent à peu près en situation de propriétaires.
Par conséquent, la différence pratique entre les politiques de l’administration Trump et le cadre gouvernemental actuel est fondée sur le degré, et non la nature. Mais en ce qui concerne le processus, c’est là que nous voyons ce que nous croyons être un changement radical.
Les administrations précédentes ont utilisé des outils relativement lents et nombre de données. Toutefois, l’administration actuelle a interprété de façon large le pouvoir législatif actuel consistant à prendre des décisions politiques unilatérales. Dans de nombreux cas, nous croyons que cette situation se résume essentiellement au choix du président d’exercer un contrôle sur une société privée ou un contrat. Les mesures sont rapides, les obstacles dits bureaucratiques sont aplatis et des mesures rapides et décisives sont la marque de commerce de cette administration.
L’incidence immédiate de ces mouvements pourrait très bien être positive. Lorsqu’on évalue une mesure individuelle, tout dépend de la qualité de l’idée. Si elle est brillante, la mettre en œuvre rapidement est judicieux. Si ce n’est pas le cas, une mise en œuvre rapidement se traduit simplement par des problèmes rapides.
Toutefois, ce type de prise de décisions centralisées ponctuelles soulève deux grandes préoccupations structurelles connexes.
Premièrement, tout le monde ne peut pas gagner. Même un décideur avisé trébuchera à l’occasion et, sans un contrôle institutionnel, les mauvaises décisions peuvent se prendre tout aussi facilement que les bonnes. Le ministère du Commerce international et de l’Industrie du Japon s’est taillé une réputation enviable aux États-Unis pour le rôle qu’il joue dans la promotion de l’industrie automobile japonaise. Cependant, la tentative de l’organisme d’empêcher Sony d’utiliser la technologie des transistors (ce qui aurait fait en sorte que le Walkman n’aurait pas été mis en marché dans les années 1980) a été moins bien reçue.
Deuxièmement, même si l’on aime la composition politique actuelle, la démocratie repose sur le changement de dirigeants politiques. L’administration suivante peut utiliser les mêmes techniques pour changer d’objectifs et promouvoir des politiques contradictoires.
Prenons les parcs éoliens presque achevés que l’administration actuelle a effectivement annulés. Peu importe ce que l’on pense de l’énergie éolienne, le pire scénario pour l’économie est de faire l’investissement, mais de ne jamais en récolter les fruits. Dans le même ordre d’idées, des administrations futures pourraient annuler des permis visant des pipelines ou des ponts. La seule chose qui soit économiquement pire qu’un pont qui ne mène nulle part, c’est la moitié d’un pont qui ne mène nulle part.
Nous entrevoyons quatre façons dont le cadre de politique économique peut évoluer à partir de là :
Pour les investisseurs, les enjeux soulevés par la prise de décisions centralisées sont faciles à ignorer pour l’instant, à notre avis. La façon dont la Cour rendra sa décision et ses conséquences à long terme dépendront à la fois des résultats des élections et de la façon dont les futurs présidents choisiront d’exercer – ou non – l’autorité que l’administration actuelle exerce. Nous demeurons toutefois préoccupés par la durabilité et la pertinence de la voie actuelle, et nous croyons que le processus législatif et réglementaire habituel procure d’importantes mesures de protection.
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